L’impression que la justice applique une double norme, notamment dans le traitement des élus par rapport au citoyen lambda, alimente un sentiment d’injustice profond. Dans le contexte mauritanien, cela peut se traduire par une tendance à considérer que certains acteurs politiques ou sociaux bénéficient d’un traitement préférentiel, ce qui mine la crédibilité des institutions judiciaires. La levée d’immunité pour certains, mais pas pour d’autres, renforce cette perception d’un système partial, où la justice semble agir en fonction des intérêts ou du statut social des individus plutôt que sur la base de règles équitables.

Ce sentiment est d’autant plus renforcé si, par le passé, des affaires moins graves ont été traitées différemment, créant un climat de méfiance généralisée. La mémoire collective retient souvent ces « double standards » comme des preuves d’un système peu transparent, ce qui fragilise la cohésion sociale et alimente la crise de confiance.

La Mauritanie traverse une période où la stabilité politique est fragile, marquée par des tensions sociales, économiques et ethniques. La perception d’un gouvernement ou d’une classe politique qui ne respecte pas ses propres normes ou qui se montre hypocrite dans l’application de la justice peut exacerber ces tensions. La population, souvent sensible à la moralité publique et aux valeurs traditionnelles, voit dans ces incidents un symptôme d’un délitement des principes fondamentaux de gouvernance.

De plus, la société mauritanienne, comme beaucoup d’autres dans la région, possède une forte dimension culturelle et religieuse qui valorise le respect, la retenue et la moralité. Lorsque ces valeurs sont remise en cause par des discours injurieux ou irrespectueux de la part de représentants élus, cela provoque un rejet moral et social, alimentant un cercle vicieux où la légitimité des institutions est remise en question.

La double norme judiciaire : un facteur d’instabilité et de méfiance

L’histoire judiciaire mauritanienne, marquée par des décisions perçues comme partisanes ou sélectives, contribue à renforcer la perception d’une justice à deux vitesses. Lorsqu’un élu bénéficie d’une immunité ou d’un traitement privilégié dans certains cas, alors que d’autres citoyens ou acteurs politiques sont poursuivis de manière plus rigoureuse, cela crée une fracture dans la confiance publique.

Ce double standard peut également alimenter la radicalisation ou la polarisation politique, où chaque camp voit dans la justice un instrument au service de ses intérêts. La transparence et l’indépendance judiciaire doivent être renforcées, avec des procédures claires et équitables, pour restaurer la légitimité des décisions et apaiser les frustrations sociales.

Les élus, en particulier ceux qui tiennent des propos injurieux ou dégradants, portent une responsabilité morale importante. Leur comportement influence non seulement leur image, mais aussi celle de l’ensemble de la classe politique. La dénonciation par certains acteurs, comme le député Biram Dah Abeid, peut contribuer à une dynamique de responsabilisation, mais cela ne doit pas rester un acte isolé.

Il est crucial que la classe politique prenne conscience de son rôle de modèle et de ses responsabilités. Des sanctions exemplaires, dans le respect de la loi et de l’indépendance judiciaire, doivent être appliquées pour dissuader toute forme d’impunité ou de favoritisme. Cela contribue à instaurer une culture de responsabilité et de respect des valeurs républicaines.

Au-delà des mesures judiciaires, la manière dont les autorités et la classe politique communiquent face à ces incidents est déterminante. La transparence, la fermeté dans la condamnation des propos injurieux, et la mise en avant d’actions concrètes pour renforcer la moralité publique peuvent atténuer la colère sociale. La perception d’une gestion biaisée ou d’un laisser-faire face à certains comportements nuit à la crédibilité des institutions.

Il est aussi essentiel d’engager un dialogue avec la société civile, les leaders religieux, et les acteurs sociaux pour rétablir un climat de confiance. La société mauritanienne doit sentir que ses valeurs sont respectées, et que ses institutions œuvrent pour la justice et l’équité.

Pour sortir de cette situation , la Mauritanie doit engager une réforme profonde de ses institutions, notamment dans le domaine judiciaire et politique. Cela implique de renforcer l’indépendance judiciaire, de lutter contre l’impunité, et de promouvoir une culture de responsabilité et de respect mutuel.

Par ailleurs, une réforme éducative et culturelle visant à sensibiliser à la moralité publique, au respect des traditions et à la lutte contre la corruption est essentielle pour bâtir une société plus juste et équitable.

En définitive, la perception d’une justice à deux vitesses en Mauritanie constitue un défi majeur pour la stabilité démocratique et la cohésion sociale. La gestion de cette crise doit s’inscrire dans une démarche de transparence, d’équité et de responsabilisation, afin de restaurer la confiance des citoyens dans leurs institutions. La classe politique, les autorités judiciaires et la société civile ont un rôle crucial à jouer pour construire un climat de respect mutuel, de moralité publique et de gouvernance responsable, afin que la Mauritanie puisse avancer sur la voie de la stabilité et du progrès

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