En Mauritanie, Le Conseil Constitutionnel est la sinécure de la République par excellence. Il s’agit d’une institution qui n’a pas d’ambition pour faire évoluer le droit constitutionnel et son rôle se résume à conseiller le gouvernement sur des questions techniques de délais (un rôle que la direction de la législation pourrait assumer), tandis que l’aspect contentieux et jurisprudentiel est complètement absent. Depuis sa création, le Conseil Constitutionnel n’a rejeté ou censuré que très peu de projets de loi et n’a pas vraiment généré de jurisprudence, hormis le projet de loi organique sur le statut de la magistrature, le projet de loi sur la lutte contre le terrorisme, ainsi que d’autres projets de loi, dont celui sur le règlement intérieur de l’Assemblée nationale.

On se demande alors à quoi sert cette institution, dont les membres rongent leur frein à longueur d’année ? En réalité, le Conseil Constitutionnel est dysfonctionnel. Non seulement, il n’est pas en mesure de dire le droit, car il ne compte aucun constitutionnaliste dans sa composition actuelle, dans la mesure où tous ses membres sont cooptés, par le pouvoir et l’opposition au sein du Parlement, sur des bases clientélaires, pour permettre aux amis et aux proches de disposer d’un revenu additionnel…mais ses membres ne communiquent pas entre eux, car ne parlant pas la même langue : le président ne parle pas l’arabe et les membres ne parlent pas le français.

Il faut réformer le Conseil Constitutionnel, aujourd’hui sans vraiment de services rendus et sans véritable plus-value, surtout qu’il pèse sur le budget de fonctionnement de l’Etat, car doté de moyens conséquents, avec un immeuble imposant, au moment où le pays a besoin de chaque ouguiya, pour lutter en priotité contre les vraies raisons de la pauvreté.

Pour redynamiser le Conseil Constitutionnel, il faudrait élargir sa saisine, en permettant à un groupe de 15 parlementaires de le saisir d’une question relative à l’interprétation de la Constitution. Une telle réforme va permettre à l’opposition de lui soumettre des questions de constitutionnalité et devrait lui donner l’opportunité de produire une jurisprudence constitutionnelle. On attend, en effet, du Conseil Constitutionnel, dont les membres doivent être des experts de haut niveau, de générer des fatwa constitutionnelles, s’il est sollicité pour donner des avis. C’est ainsi qu’il réussira à promouvoir une jurisprudence constitutionnelle et devenir une institution utile. C’est cette jurisprudence qui va permettre de faire évoluer, rationaliser et protéger le système démocratique dans notre pays.

Mohamed El Mounir