tournant ! Le pouvoir du président Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani amorce le dernier virage avant la présidentielle de 2024. Aucun doute que l’actuel locataire du Palais brun sera candidat à sa propre succession.

Les élections municipales, législatives et régionales que le parti au pouvoir El Insaf vient de remporter haut la main présagent un plébiscite plus marqué que celui de 2019, si le nouveau gouvernement dont la formation est donnée pour imminente s’attaque aux priorités de l’heure.

Les élections qui viennent de s’achever constituent donc un vrai tournant. Les hommes et femmes choisis par des électeurs mobilisés, au nom du parti El Insaf, sont ainsi libérés de « l’héritage » de la décennie 2009-2019 dont l’ombre a longtemps assombri l’horizon politique d’un parti au pouvoir pris dans l’engrenage de cette histoire alambiquée de « nehj » (voie, orientation) qui a failli tourner en bataille (politique) rangée entre les Anciens et les Modernes : ceux qui croyaient à une possible co-gérance du pouvoir entre Ghazouani et Aziz et ceux qui refusaient la répétition du diktat qu’on voulait imposer à feu Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi.

Certes, il y a des hommes et des femmes élus en 2018 (sous Aziz) qui ont réussi à conserver leurs sièges de maires députés ou présidents de conseils régionaux mais ils savent pertinemment que la rupture est consommée et qu’ils agissent, désormais, dans le cadre d’un nouveau système moins personnalisé que celui de 2009-2019 mais plus exigeant en termes de responsabilité et d’atteinte des objectifs de développement économique et social en fonction du programme « Taahoudati » par lequel Ghazouani s’est fait élire en 2019.

Le gouvernement qui sera mis en place incessamment doit avoir en ligne de mire la présidentielle de 2024. Il aura la chance de travailler sans aucune pression autre que celle de parachever le programme « Taahoudati » en bénéficiant du soutien d’une majorité confortable et du soutien d’un parti au pouvoir qui sort renforcé par ses performances politiques lors des élections qui viennent de s’achever.

Les scenarii concernant le nouveau gouvernement peuvent s’écrire dans le sens d’une continuité, avec le maintien de Mohamed Bilal Messoud à la Primature ou, s’il faut vraiment innover , de la nomination d’un Négro-africain au poste de Premier ministre pour compenser la perte, pour une communauté nationale, du poste de président du Sénat qu’avait causé la suppression de la Chambre haute du parlement mauritanien en 2017 pour satisfaire les caprices du président Aziz !

Un tel choix est loin d’être anodin. La politique le pose comme nécessité, l’apaisement l’exige. Et Ghazouani, homme du consensus lors de son premier mandat, a certainement à cœur de finir en beauté ce quinquennat pour entamer, avec force et détermination, un second qui le ferait entrer encore plus dans l’histoire politique du pays.

Et, pour dire vrai, on ne voit pas, dans les prochains mois, comment une opposition divisée peut empêcher la majorité de poursuivre son agenda politique ! Car tout est question de vision et de management stratégique pour atteindre les objectifs fixés.

Si le parti El Insaf avait à cœur de maintenir sa majorité à l’assemblée, voire de la consolider, et à travailler intelligemment pour y parvenir, l’opposition, elle, n’a pas pensé à sa cohésion interne pour se donner plus de chance en affrontant plus fort qu’elle.

Chaque parti de cette opposition vivait, en réalité, deux oppositions : contre le pouvoir, oui, mais aussi contre ses « frères » qui rivalisent pour une question de leadership.

Sawab-Rag contre le Frud, Tawassoul contre Ufp…Questions de survie pour certains (APP, AJD/MR, CVE, etc. Une cacophonie politique que le parti au pouvoir a su exploiter de si belle manière pour être au rendez-vous le 13 mai dernier mais, surtout, pour huiler sa machine électorale en vue de la présidentielle de 2024.

Sneiba Mohamed